André Tricot le cite souvent, et la Pédagogie Explicite s'appuie sur son gigantesque travail de synthèse de centaines de méta-analyses en éducation, pour déterminer quelles méthodes sont plus efficaces que d'autres.
Mais tout le monde n'en tire pas les mêmes conclusions.
La Pédagogie Explicite, par exemple, décide d'éliminer totalement celles jugées moins efficaces, même s'il est dit qu'elles pourraient dans certaines conditions développer certaines compétences.
Mais après avoir lu beaucoup de textes sur cette pédagogie dite efficace, je suis tombée sur d'autres articles, qui alertent sur le fait que le travail de John Hattie n'est peut-être pas si fiable que ça. Ce serait très embêtant, ça ! On tirerait donc des conclusions de mauvais constat ?
Par ailleurs, d'autres auteurs alertent aussi sur le terme d'efficacité (cf billet).
Je me suis donc empressée d'aller y jeter un oeil.
Les articles sont très précis et documentés. Du coup, ils sont aussi très techniques et longs...
On peut citer :
- une série d'articles d'Olivier Rey, "John Hattie et le Saint Graal de l’enseignement ," in Éduveille, 2 novembre 2016, http://eduveille.hypotheses.org/tag/visible-learning
- l'article de Stéphanie Demers, de l'Université du Québec, déjà cité dans le billet sur le terme d'"efficacité" de l'école http://mje.mcgill.ca/article/view/9404/7153
- cet exposé : Yelle F., Éthier, M.-A. et Lefrançois, D. (2016). Ce qui est visible de l’apprentissage par la problématisation: une lecture critique des travaux de John Hattie. ENJEUX, 12 (3), 35-38.
https://ledidacticien.com/2016/12/18/ce-qui-est-visible-de-lapprentissage-par-la-problematisation-une-lecture-critique-des-travaux-de-john-hattie/
- ou encore cet article très complet et assez synthétique : les recherches sur les pratiques enseignantes efficaces - Laurent Talbot (Université Libre de Bruxelles ; Université de Toulouse) - 2012 http://journals.openedition.org/questionsvives/1234
Pour résumer de manière honteusement raccourcie, on peut y lire que le travail de Hattie est critiquable pour plusieurs raisons :
- Il y a des "'portions de traitements statistiques erronées"
- Il n'évalue pas certains champs des apprentissages (le développement du jugement moral, la compréhension conceptuelle).
- La lecture qu'on en fait en France est réductrice de ce qu'il y a dans le texte d'origine, qui ne nie pas les bénéfices de certaines activités "actives".
- Les pédagogies actives développent des compétences difficilement évaluables chez les élèves, ce qui conduit peut-être à les juger "moins efficaces" que des méthodes plus transmissibles, qui ne visent que la reproduction de processus.
https://eduveille.hypotheses.org/343
Je vous met quand-même un extrait, parce que je trouve intéressant de voir la profusion de chercheurs qui se penchent sur ces questions, chercheurs qui nous sont totalement inconnus (ce qui n'est pas en soi très grave, sauf pour leur amour-propre), mais plus embêtant, dont leurs conclusions ne nous sont pas communiquées, d'une manière ou d’une autre, par l’institution.
"Pour les uns donc, ce sont les pratiques directes et explicites qui sont efficaces. À y regarder de plus près, il semblerait que cette efficacité soit réelle pour l’apprentissage de tâches fortement structurées, c’est-à-dire de tâches qui peuvent être décomposées en une série déterminées de sous-tâches qui permettent d’atteindre le bon résultat (Bianco & Bressoux, 2009). Pour d’autres, ces conclusions sont peu valides. Les défenseurs des approches écologiques ou contextualisées, se montrent critiques, voire sceptiques sur ces travaux (Carette, 2006, 2008 ; Carette et Kahn (2013) ou Kahn dans ce numéro). Ils dénoncent le caractère limité de ces premières démarches évaluatives qui sont amenées à simplifier, voire édulcorer, une réalité hautement complexe due justement aux phénomènes de contextualisation. En fait, les pratiques enseignantes explicites et directes seraient efficaces pour la construction de connaissances déclaratives ou procédurales mais beaucoup moins pour l’apprentissage des compétences qui sont par nature d’une haute complexité." http://journals.openedition.org/questionsvives/1234
On découvre donc qu'il y a à la fois des biais statistiques, des défauts méthodologiques, des raccourcis un peu rapide.
Bon ben avec tout ça, il va falloir quand-même réussir à améliorer mes séances, pour
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