lundi 17 avril 2023

Un espace relaxation dans un CDI : service gadget ou nécessité ?

J'ai lancé en 2018 un espace relaxation au CDI, avec des tapis pour pouvoir s'allonger au sol.

Il a évolué plusieurs fois depuis, pour m’adapter aux difficultés de gestion d'un outil qui m'apparaissait (et m’apparaît toujours) comme indispensable aux élèves, mais qu'ils ne s’approprient pas :
- soit ils le détournent pour parler ou dormir
-
soit ils n'ont toujours pas tilté qu'il existe (et c'est pas faute d'en causer, de le présenter à chaque cours de 6ème pendant un trimestre, et d'en parler à d'autres occasions, en direct ou par messages Pronote).

Dommage, mais révélateur des types de difficultés qu'on rencontre de plus en plus dans l'organisation d'activités péri-scolaires au collège.

N'attendez pas de ce billet autant d’enthousiasme que lors de sa première écriture il y a 5 ans. Je vais de désillusions en désillusions, avec ce truc ! C'est moi qui vais finir par m'allonger sur ces fichus tapis, si ça continue !
D'ailleurs, tiens, je n'ai presque pas envie de mettre d'illustrations cette fois, je ne suis pas d'humeur folâtre.

 

Le premier espace relaxation

J'ai la chance d'avoir au CDI une petite salle annexe, qui sert pour les cours ou les clubs le midi. Sur les heures d'étude, elle est à la disposition des élèves pour l’entraînement à l'oral, le travail de groupe ou pour la relaxation.
C'est donc dans cette salle que j'ai lancé en 2018 mon premier espace relaxation.
C'était assez simple : des tapis, 3 élèves maxi, 20 minutes, une sélection de liens dans Esidoc, et même des mandalas au début.

Les tapis servaient aussi à la sieste contée, du temps que j'en organisais régulièrement (ça, c'était avant de devoir faire systématiquement de la discipline en interrompant plusieurs fois les histoires, un oeil sur le bouquin et un oeil pour guetter les bavards, ou carrément en devant me lever pour séparer les tapis de plusieurs mètres pour éviter les bavardages incessants. J'en ai eu marre, j'ai jeté l'éponge).

Dans cet espace, les détournements sont devenus la règle, et l’émerveillement des débuts a laissé la place à de plus en plus d'agacement pour moi, et plus de fatigue. Ballot !
J'ai ainsi dû progressivement diminuer le nombre d'élèves, les activités possibles, pour finalement le stopper de toute façon avec le Covid.
J'ai ensuite réfléchi à la suite à donner à cet espace, que je ne me voyais pas abandonner complètement, malgré les désillusions.

Le club Relaxation qui y était adossé avait lui aussi disparu, à cause du Covid et de l'emploi du temps chargé de la collègue qui le menait. Il n'est réapparu que cette année, quelques mois après la rentrée.

 

Les tentatives (ratées) pour le faire évoluer

L'an dernier, j'ai mis en place des ateliers le midi pour proposer qu'on réfléchisse à cet espace, et à leur besoin (ou non) de relaxation.
Et bien il n'en est pas sorti grand chose.

A part qu'on m'a piqué les balles anti-stress que j'avais achetées pour tester.
Et que j'ai dû retirer aussi les livres de coloriage, pour éviter que ça ne se termine en tapage de discut autour d'une table, avec des élèves hyper revendicateurs, et pas du tout, mais pas du tout demandeurs de moments de relaxation.

Si leur besoin est de "colorier en toute convivialité", je trouve plus légitime qu'ils le fassent au foyer, lieu dédié à ce type de demande, et largement fourni déjà en posters de coloriage en tout genre. Au CDI, les activités des uns ne doivent pas empiéter sur les activités et les besoins (pas envie, hein. BESOIN !) des autres. Au premier rang duquel le besoin de calme et de concentration (pour les élèves, mais aussi pour moi, qui doit bosser en même temps !).

J'ai tenté de relancer cette année, sans succès. Aucune demande nouvelle, ils sont contents de ce qui existe (tant mieux pour eux, mais moi, je vois bien qu'on peut faire différemment, et mieux), et pas trop de réactions non plus quand je propose quelque chose de nouveau. Ils sont ultra consommateurs passifs, pas du tout demandeurs, ni "critiqueurs", ni force de proposition. Les seules demandes sont des demandes de "plus" façon Balsen : plus de bruit, plus d'élèves...
C’est un peu frustrant.
Non, c'est très agaçant, en fait.

Les élèves, quand on leur demande leur avis

Ce qu'il en est aujourd’hui

Voici ce que le CDI propose aujourd'hui :
- Un espace autonome et solitaire sur les heures d'étude : 1 élève maximum, à cause des bavardages s'ils sont plusieurs (ah ben ça, ça a été radical pour limiter le bruit ! Je conseille l'astuce !!). Au programme, vidéos de relaxation, assis ou allongé. J'ai d'abord supprimé les mandalas, puis depuis qu'un seule élève peut venir, et donc qu'il est compliqué pour lui de discuter (ou alors, c'est qu'il a VRAIMENT besoin de relaxation...), j'en ai remis. Et s'ils préfèrent mettre uniquement de la musique, ma foi, je laisse faire. Mais j'insiste un peu pour qu'ils testent une relaxation guidée.
- Activités en groupe les midis des semaines thématiques "Bien-être" (à peu près toutes les 3 semaines) : un thème en général, avec une activité de découverte en petit groupe, avant de tester des exercices de relaxation. J
'autorise alors plusieurs élèves à être dans la salle, soit assis, soit allongés, selon les profils d'élèves. Et s'ils ne sont pas sérieux, je note les noms et j'exclue pour les autres séances. Je gère le CDI en même temps, il reste ouvert aux autres élèves (lecture, travail ou ordinateur). Ce n'est pas toujours facile, et toujours fatiguant... Je ne ferai pas ça jusqu’à la retraite, ça c'est sûr ! Cela se terminera par de la relaxation CDI fermé, avec moi par terre avec tout le monde, je vous le garantis !
- Le tout est adossé à des initiations en cours, sur les semaines Bien-être pour les explications de départ, et en dehors pour quelques minutes de pratique de temps en temps (quand j'y pense, que j'ai le temps, que le besoin s'en fait sentir). J’imaginais que cela ferait connaître l'espace autonome sur les études, mais sans grand succès, ce qui est assez perturbant.

Les points négatifs :
- Ils n'y pensent pas sur les heures d'étude. Aucun élève (à part un, dont je reparlerai plus loin) n'a créé des habitudes. Et ce n'est pas faute d'en parler, en cours ou dans les billets hebdo d'info Pronote. M
ême quand je propose directement sur les heures d'étude, en faisant une annonce, quand je vois qu'ils bouquinent pour la 6ème heure de la semaine les mêmes BD... J'avoue que ça me rend un peu perplexe ! Ou alors c'est que leur unique souhait avant, c'était de se retrouver en catimini derrière une porte semi-fermée, pour causer tranquillos. Et que comme ce n'est plus possible, l'espace relaxation n'a plus aucun intérêt pour eux. Je ne suis pas loin de le penser.
- Il n'est pas rare qu'ils s'endorment, et que je doive les réveiller en les secouant, ce qui m'agace au dernier degré ! Cela pose la question de mettre à dispo un espace pour un besoin identifié comme légitime (stress, apprentissage de la relaxation) pour leur permettre en réalité de terminer leurs nuits trop courtes ! J'essaie de ne pas juger, mais en cas de doute, je n'autorise que la relax assise et pas allongée. Je les retrouve à dormir sur la table, mais bon, ça fait moins "leur lit"... Mais ça m'énerve quand-même, j'ai l’impression de me faire avoir, avec mes belles idées humanistes de bien-être !

Malgré tout, quelques expériences positives :
- J'accueille régulièrement un élève de 6ème qui fait des crises de panique et d'ultra stress. Il a pris ses habitudes, tapis, musique tranquille, et il vient de temps en temps faire baisser la pression, avant notamment d'affronter la suite de sa journée de cours. Je lui ai également fourni un cahier de dessins de concentration, type mandalas, qu'il conserve à la vie scolaire, pour les moments où je ne peux pas l’accueillir au CDI. Rien que pour lui, je suis contente d'avoir cette proposition dans le menu du CDI.
- Grosse demande les midis de semaines bien-être. Je propose un thème (le sommeil, par exemple), avec des activités de découverte puis des exercices de relaxation. Il y a beaucoup d'élèves qui participent, dans une atmosphère relativement conforme à mes attentes.
- Réussite aussi des exercices faits en cours. Les élèves sont assez réceptifs, calmes pendant les exercices, et on sent un véritable effet apaisant dans le reste du cours. Ils ne rechignent pas du tout quand je lance une micro-relaxation ou une minute de cohérence cardiaque. C'est déjà ça de pris !

 

La suite ?

Et bien je ne sais pas !
Je peux continuer comme ça, avec peu d'élèves, ou faire une énième tentative pour étendre son utilisation.
Avec le risque, en touchant plus d'élèves, qu'ils soient moins investis, et donc plus fatigants à gérer. Après tout, s'ils ne tiltent pas quand j'en parle, c'est qu'ils n'en ont pas besoin.

Seule solution pour l'instant, demander à faire avec toutes les classes de 6ème la séance sur le sommeil, et continuer à proposer des courts moments de relaxation pendant les cours.

Le reste suivra, ou pas, mais moi, je retourne tester les nouvelles vidéos de relax, ça me fait du bien, à moi. Allez, au lit !



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