mercredi 3 février 2016

Prof-doc, des freins à l'inter-disciplinarité ? Toutes mes excuses !

De leur côté, les professeurs documentalistes, souvent identifiés en établissement comme experts légitimes, ont eux aussi éprouvé des difficultés à sortir des partenariats habituels des enseignements info-documentaires et à mettre en place des équipes réellement transversales. Cette posture d'expert du professeur documentaliste ne saurait être exclusive, sous peine de constituer un frein à la dimension transversale souhaitée. Mais comment fédérer autour de l'EMI, la question reste encore posée à l'issue de ce TraAM.
...
Pour tenter de répondre à cette question, Dijon a transformé un cycle de formation 6e « initiation à la recherche documentaire » axé sur les étapes de la recherche documentaire, en une progression didactique et pédagogique transdisciplinaire (documentation, technologie, histoire-géographie, éducation civique et SVT) de 31h de cours, basée sur l'EMI, pour permettre de développer les cultures informationnelle, médiatique et numérique des élèves.



Quand on regarde l'exemple proposé, on se rend compte que c'est justement ce qu'on nous reproche : des heures faites tout seul avec la classe, avec la mention que ce sujet-là pourrait éventuellement être abordé avec tel ou tel collègue, mais ne l'est pas. 

C'est ça, la révolution qu'on nous promet ?
Matière, ou discipline ?

Bon, du coup, ne me reconnaissant pas dans les reproches faits visiblement aux prof-docs, je n'ai aucun scrupule à envisager de faire correctement mon métier. Voici donc mon plan pour l'an prochain.

Etat des lieux : 
- le CDI de mon collège est grand, complexe, avec beaucoup d'activités différentes proposées. Il est donc assez long à prendre en main
- tout est basé sur l'autonomie, y compris le prêt, et mon bureau (placé au milieu, noyé sous les piles et la végétation) se fait volontairement oublier pour qu'ils s'occupent seuls, sans penser à mon regard. 
- le collège comprend 480 élèves de section générale (dont 150 de sections sportives) et 120 de Segpa
- on ne peut pas dire que les élèves viennent tous d'un milieu culturellement épanoui (euphémisme), ni qu'ils sont particulièrement calmes a priori...
- malgré tout, les élèves de 4e-3e et ceux de la segpa sont très bien représentés dans les statistiques de présence, et le nombre de prêt de livres ne fléchit pas.
- même avec 30 collégiens sur une heure d'étude, je n'ai rien à dire question discipline, tout le monde s'occupe et respecte le fait que je doive travailler dans le calme pendant ces heures sans cours.

Il est donc indispensable de maintenir l'effort d'intégration des élèves qui ne viendraient pas spontanément au CDI, sans même parler de lire un livre. Ce serait un comble, alors qu'on a super bien réussi avec les collègues à limiter les inégalités culturelles de nos élèves, que cette réforme mette tout par terre !

Je continuerai donc à prendre les classes de 6e toute seule (cela ne veut pas dire de manière isolée ! Je fais partie de l'équipe pédagogique, je les évalue, je vais aux conseils de classe, et rencontre les parents lors des rencontres parents-profs), en classe entière, sur une heure d'étude (quitte à l'appeler heure CCC), pour qu'ils prennent des habitudes solides dès le début. Ils découvriront les règles, les documents, les outils. A chaque fois avec des jeux, des recherches liées à un sujet traité avec un collègue, ou des lectures sur place. Des bénévoles à la retraite viendront comme d'habitude lire avec eux. Ils découvriront la bibliothèque du quartier. Ils apprendront aussi à jouer aux jeux de stratégie proposés sur les heures d'étude (un de mes outils d'intégration et d'apaisement les plus forts).
Et je ne veux pas de demi-groupes : il faut qu'ils apprennent à se gérer au CDI en grand groupe. Comme je ne peux pas être derrière chacun pour les aider et les surveiller, ils sont obligés de devenir autonomie et s'entraident.

En 5e, je continuerai à les prendre en demi-groupe, sur une heure d'étude (quitte à l'appeler prépa EPI), pour qu'ils puissent manipuler des outils numériques plus confortablement. On verra aussi comme d'habitude les réseaux sociaux, les malwares, les hoax, les moteurs de recherche, les data center... Une fois par an, je prend quelques heures pour leur permettre d'avancer un exposé commencé en cours de chimie, d'EMC... On fait des affiches, des vidéos, sans prendre trop de temps sur les cours de disciplines. Du coup, les collègues sont davantage partants pour des exposés, puisqu'ils savent que les heures prises sur leur horaire disciplinaire ne sera pas mangé par les heures nécessaires à faire un brouillon, s'enregistrer au micro, choisir les photos, la taille des feutres, refaire un titre, lire un livre documentaire...
C'est comme s'ils devaient faire un travail en étude, mais qu'on les oblige à rester pour le faire (sinon, qui reste, à votre avis ???) et avec un encadrant prof-doc qui est là pour les aider à s'organiser, utiliser ou réutiliser tel ou tel outil déjà vu. Ils sont libres, aussi ! Ils apprécient ! "Avec vous, ça passe toujours vite."

Ce qui va changer, c'est que je vais rassembler quelques thèmes sous un intitulé EPI pour que les collègues qui aborderont certains sujets numériques puissent les comptabiliser comme heures d'EPI.
pas encore finalisé
Je vais sans doute pouvoir à terme étaler davantage sur deux ans les sujets abordés, en mobilisant davantage les profs d'EMC, avec un exposé à la main en 5e, et un numérique en 4e. A chaque fois collaboratif, parce que seul, on est moins fort. C'est ce que je serine à mes élèves sans arrêt.
Si les collègues prennent à leur compte les sujets comme les réseaux sociaux, la vie privée, je gagnerai du temps pour faire en 5e deux projets avec les classes : une vidéo en sciences et un exposé en EMC. Il faut que je regarde ce que je vais faire sauter : j'ai déjà enlevé cette année les sites sur les métiers, et les usuels papier ou en ligne. 

Et si les collègues se lancent dans des recherches doc sur davantage d'heures qu'aujourd’hui, dans des démarches de projet plus proches de ce qu'elles devraient être (mais j'avais tiré un trait dessus, personne ne voulait passer x heures sur un même travail, on allait donc au plus court), je pourrai peut-être remettre au goût du jour les techniques de mobilisation d'idées, cartes heuristiques et QQOQCP. Et demander aux élèves de faire  des documents de collecte pour rendre les travaux plus pertinents. 
Chic !

Et promis, je ne demanderai pas à récupérer mes heures de cours. De toute façon, mes élèves me manqueraient, et à la maison, je bosserais sur ordi. Autant le faire au CDI avec des élèves qui lisent autour de moi.

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