Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément.
Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage,
Polissez-le sans cesse, et le repolissez,
Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.
Boileau, L'Art poétique
C'est beau, non ? A lire à haute voix, en articulant comme mon grand-père le faisait, pour savourer.
Donc, il y a quelques jours, je me demandais ici comment faire pour qu'un ado de 14 ans reprenne un livre après une lecture qui lui a plu ? C'est ça, être lecteur, non ?
On pourrait dire qu'il faut :
1- Qu'il se considère comme appartenant à la communauté des lecteurs, qu'il en soit fier
2- Qu'il sache ce que la lecture lui apporte, et donc aussi ce qu'il perd en arrêtant ! Qu'il ait développé des habitudes et donc une certaine dépendance par rapport à la lecture comme loisir.
3- Qu'il connaisse ses goûts, qu’il sache quel lecteur il est
4- Qu'il voit ses parents lire ! C'est drôle, hein, tous ces adultes qui regrettent que les enfants ne lisent pas, ou pas assez, ou pas les livres qu'il faut ! S'ils savaient que la balle est souvent dans leur camp !
5- Qu'il sache où trouver des idées de lecture pendant ses années collège (ça, c'est notre travail !)
6- Qu'il continue à trouver des idées de lecture APRES le collège (on peut peut-être donner un coup de main)
Mea culpa, si je ne suis pas trop mauvaise pour faire lire aux élèves des livres qui leur plaisent (billet précédent), j'ai laissé tomber certains de ces objectifs-là. Pour ma défense, je pourrais avancer qu'il est difficile d'agir au mieux quand on voit peu de classes pour des projets lecture, et que depuis quelques années, les élèves fuient les clubs et toutes formes de contrainte sur temps libre.
Mais il doit y avoir quand-même des solutions pour ne rien regretter.
Il faut donc que je reprenne ces objectifs un par un, pour trouver des nouveaux ressorts à ma pratique.
Idée 1 : Pour commencer, je vais essayer de recréer une communauté en imposant des projets communs.
Depuis quelques années, pour ne pas faire fuir les élèves de club, je les laisse faire leurs projets à eux, j'interfère le moins possible. On a même enlevé le mot "lecture" du nom de club, trop risqué !
Mais du coup, on ne monte plus de projets ensemble, on ne fait plus de vidéos de groupe, on ne crée plus de fausses émissions de télé collectives, on ne fait plus l'école buissonnière pour aller choisir des livres à la librairie. Et l'image du club se délite, son identité disparaît.
Il faut que j'essaie de recréer un esprit collectif :
- Trouver une idée fédératrice : un projet unique, une vidéo ou un journal auquel tout le monde collaborera. Je vais opter pour commencer pour le journal, les élèves étant déjà partis sur des petits projets. On verra l'an prochain.
- Refaire des sorties ou organiser des rencontres, et tant pis si c’est une galère à organiser, et que les élèves ont des cours à rattraper.
Sortie librairie pour interviewer les libraires. |
Et il faut que j'arrive à ce que des élèves viennent (ça parait bête, hein !) :
- Qu'ils sachent que ça existe. Et c'est pas gagné ! Parce que les affiches, n'est-ce pas... Alors quoi faire de plus ? A part passer dans toutes les classes plusieurs fois pour en parler, je ne vois pas. Le marque-page, peut-être ? cf plus bas.
- Donner envie aux élèves de venir. Visiblement, mes TUC ne suffisent plus ! Un collègue va manger à la cantine avec les élèves du club lecture, c'est une sacrée bonne idée. En plus, cela donne une visibilité au groupe.
Pour cette année, je laisse tomber le prosélytisme, mais l'an prochain, il va falloir de la pub et un super projet pour relancer la machine. L'expo Harry Potter postée par une collègue m'attirerait bien ! Du sacré bon boulot ! J'aimerais associer les élèves à la création d'une expo de ce type.
Idée 2 : Pour cette communauté il faudrait un outil de communication fédérateur et durable.
Fédérateur pour faire exister le groupe, et durable pour que les anciens élèves (ou les 4e-3e qui ne veulent plus venir manger des TUC...) continuent à se référer à nos idées de lecture. C'est donc un outil qui peut servir pour aujourd’hui, et pour demain.
Parmi les options possibles, d'ailleurs cumulables :
- Une rubrique dans esidoc, que les anciens élèves pourraient continuer à aller voir ?
- Un bulletin d'info envoyé par courriel ? via Pronotes ? via Folios ?
- Une page facebook ? Elle existe déjà, mais je suis la première à leur dire ne pas s'abonner, de ne pas mettre de commentaires pour ne pas s'exposer... qu'on peut y aller sans avoir de compte...
- Un journal littéraire, avec des conseils de lecture rédigés par les collégiens, disponible en ligne et à la bibliothèque ? Tiens, ça, c'est une idée ! Je suis déjà lancée, je vous en reparlerai ! Je pense utiliser un compte ouvert Madmagz en payant la somme nécessaire à la fin d'un magazine pour obtenir le pdf à imprimer.
Idée 3 : Il faudrait davantage faire connaître les sites qui donnent des idées de lecture, ou créer nous-même des outils
Une idée toute bête que j'ai pratiqué pendant longtemps, et laissé tomber à tort, alors qu'il permet de cibler les lecteurs : créer des marque-pages avec des infos, des sites, les RDV programmés... Les imprimer sur du bristol (attention toutes les imprimantes ne supportent pas cette épaisseur de feuille) et les faire décorer par des élèves, c'est encore mieux.
On peut aussi faire des bulletins A5 "Vous avez aimé ceci, vous aimerez cela" ou "vos parents ont aimé vous piquer ceci, faites-leur lire cela". J'en ai des tonnes dans mes vieux fichiers. Les lecteurs aiment collecter ce type de bulletins. Ils les conserveront, et qui sait, les retrouveront plus tard, dans quelques années.
Si le titre est en caractère à remplir avec des couleurs, les Z adoreront mettre de la couleur, et cela fera d'une pierre deux coups : ils connaîtront l’existence de ces bulletins. A refaire, donc !
On dépouille déjà les sélections des magazines, mais je ne leur ai pas encore fait utiliser des sites comme Babelio. On pourrait aussi chercher des chaînes de booktubeurs.
Un des sites à faire connaître |
Et pour le point 6, "Qu'il continue à trouver des idées de lecture APRES le collège", on fait quoi, alors ??
Suite au prochain épisode. Il faut déjà que je mette en place les idées de la semaine !Mais j'ai des pistes ! Et elles sont à chercher du côté de l'outil de communication fédérateur si on a réussi à le créer, du côté des libraires et bibliothécaires, et des collègues de lycée. Il va falloir créer des passerelles.
Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire