samedi 18 décembre 2021

Les 6èmes, la suite : des petits bouts mis bout à bout ne font pas un tout !

Je voulais revenir avec vous sur les séances de début d'année en 6ème, celles qui ont précédé les ateliers sur Esidoc présentés la semaine dernière.
Mais les difficultés que j'ai repérées chez les élèves dernièrement m'ont obligée à faire une pause et à réajuster les activités.
Et grand bien m'en a pris !

Voici mon analyse de ce qui a bloqué, et ce que j'ai modifié. Avec des tas de perspectives pour la suite, et pour l'an prochain. On apprend de ses erreurs. Enfin, + moi qu'eux !!😂

 

Qu'est-ce qui bloque ?

Le souci, ce n'est pas que les élèves ne connaissent pas les classements avant d'arriver au collège ; ça, c'est la norme, j'y suis habituée.
C'est plutôt le fait que le concept de classement soit hermétique pour eux. Ils ne comprennent pas la notion de "code de classement", et peu sont capables de repérer ou comprendre les marqueurs : cote, type de documents, lettre ou chiffre en haut, auteur en bas, et indications sur les étagères.
Même la notion d'auteur, ou du nom de famille de l'auteur semble compliquée pour eux.
Par rapport aux autres années, j'ai l'impression qu'aucun déclic ne se fait, aucune déduction.

Sur Esidoc, c'est carrément la cata.
Qu'ils ne trouvent pas du premier coup, j'ai l'habitude. J'ai justement créé des bocaux à étiquettes pour qu'ils découvrent/comprennent peu à peu, au fil de leurs essais-erreurs, de leurs déductions. C'est plus efficace que des activités écrites ou des fiches, je trouve. J'ai passé des années à leur faire créer des cotes sans que jamais ils ne fassent le lien avec les livres et les classements. Depuis, j'ai lâché les activités didactiques "cotes" pour des jeux "livres à trouver" et des jeux dans esidoc. Pour qu'ils construisent seuls et peu à peu la notion de code de classement, et apprennent à s'en servir en autonomie.

Mais cette année, de déductions, point !
Certains ne trouvent même pas le titre sur l'étiquette, et viennent me voir :

"Madame, il est où le titre ?"

J'ai eu droit aussi à "Le traducteur, c'est celui qui raconte le livre", et à "C'est quoi un sommaire ?"
 
Pour résumer mon impression, je dirais que ça bloque au niveau de connaissances que je pensais déjà vues (à défaut d'être intégrées), et ça bloque aussi en terme d'esprit déductif et de mémorisation.
Qu'ils ne sachent pas en 6ème la différence entre "emprunter, réserver, commander et acheter", c'est assez logique. Mais est-ce toujours normal après qu'on ait expliqué la différence 3 fois, et qu'on ait fait des exercices de réservation sur Esidoc ?

Un autre souci vient de leur non-capacité à travailler en autonomie et en groupe.
Quand ils découvrent l'atelier vert, avec les consignes collées dessus, si je les laisse faire, je les retrouve tous à lire le journal et attendre que le temps passe...
Et il faut expliciter des choses qui me semblaient aller de soi : quand on distribue une ardoise collective et que quelqu'un l'a entre les mains, il note ce que le groupe va décider qu'on y inscrit, après discussion entre eux. Il ne se fait pas enguirlander parce qu'il n'a pas écrit ce que l'autre voulait écrire, et on ne lui arrache pas l'ardoise des mains !!
Et ben c'est pas explicite !! Cela aboutit à des scènes surréalistes où une profdoc dépassée par la quantité d'éléments à prendre en compte se retrouve à hurler : "Mais bon sang, vous allez vous parler GENTIMENT, ou j'en fous un dehors ??"😂

 

La reprise en main de décembre

J'ai déjà parlé des ateliers "vocabulaire et esidoc" ici : https://clairementdoc.blogspot.com/2021/11/les-6emes-cest-mieux-par-petits-bouts.html

Vu les difficultés, et le temps que ça prenait, j'ai créé des boites de jeux en équipe, pour rajouter des ateliers plus concrets et ludiques, sur les cotes et les classements. Je partage ici les consignes complètes.

J'ai distribué une grille individuelle, parce que la collective s'est révélée trop compliquée à gérer :


Et puis j'ai bien vu que tant que je les laisserai seuls devant leurs difficultés, rien de constructif n'allait en sortir !! La somme des difficultés est trop grande à gérer pour eux. Et un élève perdu est un élève soit bruyant soit agressif, soit les deux !

En parallèle, ça a fait tilt avec ce que je venais d'apprendre lors du Mooc sur la psychologie pour les enseignants, ou de formations sur l'attention et la mémorisation. Ce n'est pas encore totalement intégré, mais j'ai vu que j'appliquais déjà sans le conscientiser certaines méthodes citées, mais sans aller au bout.

Donc reprise en main plus didactique lors de la toute dernière séance de décembre, la 7e avec eux (ben oui, un profdoc, c'est #devantélèves, mais pas souvent !!! Les choses se mettent donc en place lentement, mais j'espère, sûrement).

Cliquez pour ouvrir le diaporama

On distribue une ardoise collective par table.
J'ai fini par les distribuer moi-même,
parce qu'une distribution de 6 ardoises + 6 feutres par 2 élèves de 6ème, c'est 22 paires d'yeux qui suivent les déplacements des deux élèves debout, en faisant au passage des commentaires et en s'arrachant les ardoises !! Une illustration parfaite de la métaphore de l'abeille dans les exercices sur l'attention ! Pff...

L’abeille du programme ATOLE

J'ai mis sur le diapo :

1- Un jeu LearningApps sur Fiction / Documentaire, à partir de couvertures de livres du CDI, en reprenant la base d'un jeu créé par un collègue

2- La photo d'un rayonnage de romans, la même exactement que celle que j'ai utilisée dans le diaporama de révision. Ils semblaient tous la découvrir, c'était troublant, comme si on n'avait pas déjà fait le même exercice ! Un jour sans fin !
A partir de déductions à partir de la photo, l'objectif est d'arriver à la phrase : "R pour roman et 3 premières lettres du nom de famille de l'auteur".
Je vérifie que le coup du R est compris : "Et si c'est un conte, on mettra quoi ? Et pour une pièce de théâtre ?"

Contrairement à la première fois, je passe ensuite à un exercice d'application immédiat. La première fois, j'avais imaginé que le fait de le déduire à l'oral suffisait à rendre évident le concept, et donc son transfert. Ben non.

3- On passe donc à des couvertures de fiction, et ils doivent créer des cotes en collectif avec leur ardoise. Et c'est là que vous tombez des nues, et que vous comprenez que l'oral ne suffit pas.
Dès la première couverture, j'ai eu des tas d'autres propositions pour la 2e ligne (prénom, titre...). Et pour la 1ère ligne, d'autres lettres que celles qu'on avait citées, y compris F. Plein de F ! Donc tant qu'il y a des erreurs, je continue, et ensuite, je passe aux livres doc.

4- Je leur parle du classement des livres doc avec un rappel historique de l'histoire des livres : avant l'imprimerie, Gutenberg, les premières bibliothèques, Dewey et l'accès libre, la première bibli pour enfant à Paris qui a 100 ans.
Puis je montre les 10 classes, le tableau ("Ouah !!!"), et on fait quelques exercices à l'oral pour qu'ils comprennent le principe.


S'il reste du temps, c'est que je n'ai pas fait de discipline, et qu'ils ont été rapides ! Donc j'ai le temps de montrer le clip Dewey pour finir, et je fais des pauses pour qu'on essaie de deviner ce qu'il dit en gros (on devine à son air et ses mimiques, et ils reconnaissent quelques mots), et pour poser des questions sur les cotes.
Et sinon, c'est le signe qu'il vaut mieux les laisser regarder le clip à la maison, pour éviter que le cours ne "dé-rap"...

Ensuite à la maison, ils ont des jeux à faire pour réviser. Avec à chaque fois un petit truc à m'envoyer via Pronote.
Cette fois, je leur ai donné le même mot croisé que celui qu'on a fait ensemble, dans sa 2ème version plus complète. Et cette fois, j'ai compris comment ça marche, je lance un QCM sans la correction, rattaché à un cahier de texte, et j'annule les réponses des élèves qui visiblement ont raté l'ouverture du QCM et validé trop tôt (il y en a tout le temps plein !).

J'ai prévu la grille pour qu'elle donne à la fin un mot inventé. Ils peuvent, s'ils le veulent, inventer sa définition.
Et vu les premières réponses, je pense que cela sera l’occasion d'une petite activité rigolote à la rentrée. Ils n'ont pas dû beaucoup jouer au jeu du dictionnaire à la maison. Comment ça, c'est quoi ? Mais, mais, vous n'avez pas eu des parents, des grands-parents, des oncles et tantes profs, vous ? Ah ben voilà ! 😂

Et à la rentrée, je ferai une petite évaluation de cotes, comme je le faisais autrefois, quand j'avais 1h semaine, pour vérifier si cette fois, ouf, c'est bon...


Ce que je ferai AVANT, l'an prochain 

 
Je proposerai davantage d'ateliers "simples", sans tâche complexe, à faire en équipe de 2 ou 4, mais tous en même temps, pour me faciliter la vie (omondieu les 5 ateliers différents à gérer avec des élèves non autonomes...), avec correction collective à la fin.
Par exemple des trucs comme ça, sous les yeux, et pas vidéo-projeté, et à faire à deux, et pas à l'oral en participant :

Je me suis dit aussi qu'au lieu de montrer le plan du CDI au vidéoprojecteur, pour expliquer que les romans sont ici ou là, je leur donnerai un plan numéroté pour 2, avec des questions : "Si je veux lire des romans policiers, je vais à quel numéro ?"...
 
C'est assez facile de tout aborder de cette manière, pour davantage d'engagement et de mémorisation. Je pourrais le faire dès le début de l'année, pour limiter le nombre d'informations données à l'oral.
On peut procéder ainsi pour les horaires, les règles de vie ou les activités, en donnant comme document la plaquette de présentation, le planning de la semaine, le règlement des ordinateurs, la liste des clubs...
Il faut juste trouver une méthode un peu ludique soit pour répondre, soit pour corriger.
 
Cette année, avec la visite virtuelle, j'avais prévu des réponses chiffrées qui constituaient un code, permettant lui-même d'ouvrir un cadenas.
On pourrait imaginer un ordinateur connecté au cadenas, où les élèves devraient aller taper leur code, pour vérifier s'ils ont bon, et découvrir une petite surprise sympa.
Le souci, c'est que cela demande une très grande organisation, et un timing nickel pour être prêt le jour J. Pas question de changer le questionnaire à 9h pour 10h, parce que à tous les coup, on va oublier de modifier le cadenas associé.
Et il faut prévoir d'allumer 3 ordinateurs avant, avec sa propre session, en mettant la page du cadenas déjà à l'écran. Heureusement, j'ai une multi-session, obtenue de haute lutte ! Au début de l'année, cela prend 15 minutes à un 6ème d'allumer un ordi ! Alors quand ce n’est pas le cœur de l’activité, et qu'on les a tous les 15j, c'est assez agaçant.
Pas sûr que je m'en sente capable. Une tablette connectée en wifi serait plus simple à gérer.

Je vais aussi réfléchir à des auto-corrections, qui me dégagerait un peu de temps pour d'autres groupes. C'est pas fun, mais pratique. Il faudrait que l'auto-correction soit associée à une question du genre : "Vous avez eu faux à une question. A votre avis, pour quelle raison ?", pour les obliger à comprendre leurs erreurs.

Je ne proposerai les boites vertes et roses qu'après avoir fait l'activité guidée avec le diaporama didactique. Comme une vérification et un entraînement, et pas un apprentissage.

Je vais également rendre plus explicites l'apprentissage des activités en groupe : "on ne se tape pas, on ne s'insulte pas, on ne joue pas, on aide et on est courtois !".
 
Je leur parlerai de leur cerveau et de leur mémoire. On a commencé avec les PP à y réfléchir, et il y a une vraie piste de ce côté-là !
J'ai abordé le sujet hier avec une classe qui continuait à causer même après le lancement de la vidéo "C'est pas sorcier" :  
"Votre cerveau ne peut pas faire deux choses à la fois, mes cocos ! Et le mien non plus ! Donc si je dois vous surveiller et râler, je ne peux pas vous aider et être au top pour animer la séance !"
Extrait du programme ATOLE en cours de digestion...
 
Ils ont eu l'air réceptifs et intéressés. Et très attentifs ensuite, ouf !
 
Ce ne sont pas des mauvais bougres, ils sont juste perdus.
Quand ils comprennent, ils sont mimi et intéressés. J'ai enfin découvert leur vrai visage, et ça me rassure. Je vais tout mettre en œuvre pour les ramener vers la lecture et la culture "active" et pas "hyper-active"...
Comme dit un de mes élèves : "La lecture, j'aime pas, ça me déconcentre !"
De son activité intense intérieure, ça, à n'en point douter.
Je vais donc dopaminer les activités du CDI, pour m’immiscer dans leur circuit de la récompense !😉

Allez, viens lire au CDI !!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire